Poubelles la vie
De Slate.fr
Ça fait un bail que je me demandais qui oserait,
et ce que celui (ceux) qui oserait pourrait en faire. Une série sur des
éboueurs, ces types mystérieux qui vous réveillent le matin, ces
ombres vertes qui bloquent votre rue en fin d’aprem, ces bienfaiteurs presque
invisibles qui permettent à nos avenues de rester des avenues – demandez aux
Marseillais. Bref, je m’égare. Une série avec des éboueurs dedans, elle pouvait
être plus belle que poubelle. Mais pour ça, il fallait des scénaristes pas
bourrins et un regard délicat, pas une grosse blague sur ceux qui ramassent nos
ordures. Ce sont les Suisses qui l’ont fait. Sans blague. Cette série
s’appelle CROM, et elle commence dans une
grosse heure (à 18h40 ce mardi) sur TV5 Monde.
On va freiner d’entrée de jeu le
camion-benne : CROM (pour Centre de Recyclage des Ordures
Ménagères) n’est pas un chef-d’œuvre. C’est une petite comédie sentimentale
intime et (un peu) sociale, sur une bande de cantonniers confrontée aux galères
du quotidien et à une nouveau patron surexcité et capitaliste qui explique, « la
voirie, tu l’aimes ou tu la quitte. » Au centre de l’histoire, Oscar,
un brave type gentil comme tout, un peu patachon, qui aime les tournées avec
Don Giovanni à fond dans l’autoradio, sa fille de 11 ans et sa femme… qui le
met à la porte parce qu’elle s’ennuie, parce que la vie, elle, elle ne la voit
pas comme une tournée pénard.
CROM n’est pas une série sur
les éboueurs, plutôt une histoire humaine sympathiquement (et tristement)
banale, dont les héros sont des éboueurs. Des bras cassés attachants, un peu
gaffeurs, des gens simples, mais pas dans le sens méprisant du mot. Juste des
types corrects, qui se plaignent rarement de leur vie, qui font leur boulot en
bons copains, sans juger celui qui jettent les sacs dans la benne à côté d’eux.
Comme il faut bien un petit élément dramatique déclencheur, vient s’inviter
dans cette bande une jeune délinquante qui, on s’en doute, se révèlera au fur
et à mesure des épisodes une chic fille pleine de ressources.
Sans casser des briques, sobrement, simplement, CROM
dessine ces personnages, prend son temps, réussit quelques bonnes blagues et
quelques jolies répliques – « je débarrasse les gens, les riches et
les pauvres, du superflu », lâche Oscar, poète de la poubelle – pour
finalement nous convaincre de suivre le chemin de ses héros. Il y a encore
beaucoup à faire autour des ordures – j’aimerais bien un thriller avec des
éboueurs tueurs ou une séries SF sur des éboueurs intergalactiques – mais CROM
offre une belle entrée en la matière. Elle a même eu le mérite d’offrir un peu
de visibilité médiatique à un métier souvent méprisé .
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